Le modèle des 9 limites planétaires nous montre les 9 seuils que nous ne devons pas franchir si nous souhaitons continuer à nous développer dans des conditions favorables. Regardons dans cet article pourquoi les limites planétaires sont des opportunités pour les investisseur à impact.
Le modèle des 9 limites planétaires (planetary boundaries) est publié en 2009, dans les revues Nature et Ecology and Society. Il a été établi par une équipe internationale de 26 chercheurs, menés par Johan Rockström du Stockholm Resilience Centre et Will Steffen de l'Université Nationale Australienne.
Ce modèle identifie 9 seuils que nous ne devons pas franchir si nous souhaitons continuer à nous développer dans des conditions favorables. C’est-à-dire, en évitant les modifications brutales, non-linéaires, difficilement prévisibles, et potentiellement catastrophiques de l’environnement comme le furent en 2021, la tempête de neige Filomena à Madrid ou encore le dôme de chaleur suivi d'incendies en Colombie Britannique, au Canada. Ce nouveau modèle de mesure de l’empreinte écologique des hommes servira par la suite à caractériser l’anthropocène* ou encore l’économie du Donut**.
Une acceptation politique
Au sein de la communauté internationale, le modèle des limites planétaires n’est que partiellement adopté. En 2012, lors d’une conférence sur la durabilité mondiale, l’ONU exprime sa vision :
« La vision du Groupe de haut niveau est d'éradiquer la pauvreté et de réduire l'inégalité, de rendre la croissance inclusive et la production et la consommation plus durables, tout en combattant le changement climatique et en respectant une série d'autres limites planétaires »
Si le concept de limite planétaire est incorporé dans la version initiale des conclusions de la Conférence des Nations unies sur le développement durable, il est, par la suite, retiré du texte de la conférence. D’une part à cause des craintes de quelques pays pauvres que son adoption fasse défaut à la réduction de la pauvreté et du développement économique, mais aussi, parce que l'idée est " trop nouvelle ”. Par la suite, les Nations Unies créerons un autre modèle, celui des Objectifs du développement durable.
Cependant ce modèle est repris par l'Union Européenne en 2013 avec le Programme d’action général de l’Union pour l’environnement à l’horizon 2020 : “ Bien vivre, dans les limites de notre planète ”.
Le modèle des limites planétaires
Ce modèle identifie les neuf causes des activités humaines les plus critiques pour l’environnement et la biosphère. Les limites sont le changement climatique, l’acidification des océans, la destruction de l’ozone stratosphérique, la perturbation des cycles de l’azote et du phosphore, la consommation d’eau douce, le changement dans l’utilisation des sols, l'érosion de la biodiversité, la diffusion d’aérosols dans l’atmosphère et la pollution chimique.
Ce qui le différencie des autres modèles connus jusqu’alors est sa dimension systémique des impacts causés par le dépassement des limites planétaires. En d’autres termes, chacune des 9 dimensions a un impact (direct ou non) sur les autres et donc sur le système global que l’on appelle la biosphère (l’atmosphère, la lithosphère et l’hydrosphère).
Les limites sont interconnectées.
De plus, l’inertie des systèmes naturels implique la non-réversibilité des changements produits. Cela est dû au fait que l’échelle de temps de réhabilitation des milieux est largement supérieure à l’échelle de temps de leur modification. Le même phénomène se produit avec les énergies fossiles : celles-ci sont appelées comme telles seulement parce que nous les consommons plus rapidement qu'elles ne se régénèrent.
Lorsque ce modèle est créé en 2009, la communauté scientifique fait un premier état des lieux. On remarque alors que sur les 9 limites, 3 sont déjà atteintes, parmi lesquelles le changement climatique, l’érosion de la biodiversité et la perturbation du cycle biogéochimique de l'azote. En 2015, la perturbation du cycle du phosphore est également dépassée, avec cependant des variations importantes selon les régions. Enfin, la modification des usages des sols, qui représente l'utilisation intensive des terres arables*** est également dépassée depuis 2015.
Ce modèle traite uniquement de la dimension environnementale et omet les dimensions sociales et économiques. Cependant, tous les enjeux du développement durable sont également interdépendants.
En effet, résoudre les problèmes environnementaux ne résoudra pas les problèmes sociaux actuels (la pauvreté, la famine, l’accès aux soins ou l’éducation), cependant cela permettra d’en éviter de nouveaux, comme les conflits ou exodes climatiques, la propagation de maladies etc...
Il en va de même pour la croissance économique, il n’est pas évident d’avancer que résoudre la crise écologique va favoriser la croissance économique sur le court terme, cependant cela aura pour avantage de limiter les risques dus aux enjeux environnementaux (approche ESG). La bonne recette est donc de prendre en compte ces limites dans les actions sociales et de développement économique, et notamment dans une démarche d’investissement à impact.
Les solutions qui s'offrent à nous
Bien souvent, lorsqu’il s’agit de problèmes écologiques, cela est relié à la consommation humaine (émissions de CO2, utilisation de plastique à usage court, achat d’aliments hautement transformés etc…). La première solution est donc de réduire la demande donc la consommation, faire preuve de sobriété. On pourra ensuite essayer d’améliorer les usages et modes de consommation et enfin, si cela n’est pas possible, de recycler, récupérer ou réutiliser les déchets.
Lorsqu’il s’agit d’investir, il est également possible d'avoir un impact positif sur ces 9 enjeux. Dans notre série "Les limites planétaires", nous aborderons une à une chaque limite, nous vous expliquerons ces enjeux et proposerons des solutions.
Je souhaite devenir un investisseur à impact
* Anthropocène : Une nouvelle époque géologique qui se caractérise par l’avènement des hommes comme principale force de changement sur Terre, surpassant les forces géophysiques.
** Economie du donut : Ce modèle économique combine le concept de limite planétaire avec celui de frontières sociales. Il propose de considérer la performance d'une économie par la mesure dans laquelle les besoins des gens sont satisfaits (plafond social) sans dépasser le plafond écologique de la Terre.
*** Terre arable : Une terre arable est une terre qui peut être labourée ou cultivée. Les terres arables comprennent les terrains en jachère, les cultures maraîchères et céréalières et les prairies artificielles. Quand ils sont intensivement cultivés et labourés, les sols arables peuvent perdre certaines de leurs qualités.